Honorer la mémoire des victimes des pensionnats autochtones par l’art

Par Eliska (Ellie) Podsednik, spécialiste en communications, Relations avec les autochtones

Avertissement : Ce billet de blogue porte sur les pensionnats autochtones, ce qui pourrait choquer certains lecteurs ou lectrices ou faire remonter beaucoup d’émotions.

Le deuil collectif des communautés autochtones
Au printemps 2021, lorsque les médias ont révélé que les dépouilles d’enfants autochtones avaient été découvertes sur le site d’un ancien pensionnat autochtone, Danielle Robinson ne savait pas comment se sentir. Durant les jours qui ont suivi, elle s’est abstenue de réfléchir à cette nouvelle et d’en parler.
 
Danielle Robinson porte une jupe à rubans, une pièce de vêtement que portent traditionnellement les femmes autochtones.
Danielle Robinson porte une jupe à rubans, une pièce de vêtement que portent traditionnellement les femmes autochtones.
D’origine anichinabée, Danielle travaille pour la Croix-Rouge canadienne depuis août 2020 et met au service de l’organisation son expérience personnelle et son expertise en santé publique acquise au deuxième cycle.

La découverte des dépouilles d’enfants sur le site de l’ancien pensionnat autochtone de Tk'emlúps a confirmé ce que Danielle et bien d’autres Autochtones pressentaient depuis des décennies : un très grand nombre d’enfants autochtones arrachés à leur famille pour être placés en pensionnat n’en sont jamais revenus. Depuis des générations, les abus commis à l’intérieur des murs de ces écoles, qui se comptaient par centaines, ont des conséquences durables sur les communautés autochtones. Devant la récurrence des découvertes de sépultures anonymes en Amérique du Nord, on n’a d’autre choix que de regarder cette triste réalité en face.

Un bâtiment en briques et 215 papillons
D’aussi loin qu’elle se souvienne, l’art a toujours fait partie de la façon dont Danielle se définit. Que ce soit pour comprendre les émotions qui l’habitent ou exprimer comment elle se sent, elle se tourne vers l’art.
 
Une œuvre d’art numérique qui consiste en une photo d’archive en noir et blanc du pensionnat autochtone de Tk'emlúps, sur laquelle sont superposés 215 papillons colorés qui représentent tous les enfants présumément enterrés sur le site de l’ancien pensionnat.
« 215 Free », courtoisie de l’artiste anichinabée Danielle Robinson.
Quand elle était petite, sa mère lui disait avec tendresse que les papillons qui volaient autour d’elle personnifiaient sa grand-mère. De cette façon, Danielle en est venue à associer les papillons aux esprits, parce que, comme ont lui a déjà dit : « Les esprits reviennent de toutes sortes de façons ». C’est ce qui explique pourquoi elle a commencé à dessiner des papillons dans les jours qui ont suivi la découverte des sépultures à Tk'emlúps. Plus de 40 papillons uniques ont pris forme en un rien de temps.

Dans les médias, une image du pensionnat autochtone de Tk'emlúps revenait sans cesse : une photographie d’archive dans les tons de gris d’un bâtiment en briques pour le moins lugubre. C’est sur cette image que Danielle a superposé 215 magnifiques papillons uniques et colorés pour représenter chacun des enfants détectés par géoradar.

« Les papillons subissent une transformation. Peu importe la vie qu’ils ont mené, ils deviennent de magnifiques esprits lorsqu’ils disparaissent. »

Après avoir surmonté la douleur initiale de la nouvelle, Danielle a trouvé un certain apaisement en sachant que les dépouilles des enfants avaient été localisées après tant d’années.

« Les corps de ces jeunes enfants seront rapatriés dans leur communauté d’origine pour que leur famille organise enfin des funérailles », explique-t-elle.

Dans la foulée de cette découverte, des feux sacrés ont été allumés d’un bout à l’autre du pays dans le respect des traditions funéraires autochtones. Ces feux honorent les victimes et aident les esprits à traverser de l’autre côté. D’après Danielle, même si elles sont déchirantes, les découvertes à Tk'emlúps et à d’autres sites d’anciens pensionnats autochtones marquent une étape importante pour libérer les familles d’un terrible fardeau et leur permettre de faire leur deuil.
 
Les communautés pansent leurs plaies et les recherches se poursuivent
Dans les mois qui ont suivi, Danielle a passé beaucoup de temps à discuter avec ses proches pour digérer les nouvelles. « Mon art a aidé d’autres personnes à gérer leurs émotions et à comprendre ce qui était en train de se passer. »

La Première Nation Tk'emlúps te Secwépemc était la première communauté au Canada à utiliser un géoradar pour vérifier si des dépouilles d’enfants se trouvaient sur le site de l’ancien pensionnat autochtone de Tk'emlúps. Depuis, de nombreuses autres communautés leur ont emboîté le pas pour mettre au jour la vérité enfouie dans le sol des pensionnats autochtones d’Amérique du Nord. La recherche de réponses se poursuit pour permettre aux familles de faire leur deuil.

Plusieurs autres découvertes ont été faites depuis la première, il y a un peu plus d’un an, ce qui fait remonter beaucoup d’émotions dans les communautés autochtones et allochtones.

De nombreuses personnes allochtones ont été choquées de voir l’héritage colonial du Canada être révélé au grand jour, en partie parce qu’il a été discrètement omis du programme scolaire public. Si vous souhaitez en apprendre davantage sur les cultures autochtones, suivez le cours Indigenous Canada gracieusement offert par l’Université de l’Alberta. On y explore les histoires plurielles et les perspectives contemporaines des nations autochtones vivant au Canada, l’histoire et les répercussions de la colonisation ainsi que le système des pensionnats autochtones.

La Croix-Rouge canadienne est honorée que des membres de son personnel qui s’identifient comme Autochtones, comme Danielle Robinson, aient choisi de mettre leur expertise et leur expérience au service des objectifs de l’organisation. Pour vous joindre au personnel de la Croix-Rouge canadienne, posez votre candidature à l’un de ces postes passionnants. Nous encourageons toutes les personnes qualifiées à postuler, particulièrement les personnes autochtones, les personnes vivant avec un handicap, les personnes racisées et les personnes issues de la diversité sexuelle et de genre, ainsi que toutes les personnes partageant nos valeurs et notre volonté de bâtir un environnement de travail inclusif et diversifié.

De nombreuses ressources sont à la disposition des survivants et survivantes des pensionnats autochtones :
  • De l’aide est offerte aux personnes qui souffrent des séquelles laissées par les pensionnats ainsi qu’aux personnes ébranlées par les nouvelles découvertes. Vous pouvez joindre la Société des survivants des pensionnats indiens au numéro sans frais 1 800 721-0066.
  • Une ligne d’écoute nationale a été mise sur pied pour venir en aide aux survivants et survivantes des pensionnats et aux autres personnes touchées. En cas de détresse émotionnelle ou de crise, vous pouvez obtenir des services d’orientation en tout temps au 1 866 925-4419.
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