Résilience et guérison dans les communautés autochtones

Pour Shelley Cardinal, tout a commencé avec un navet.

Canadienne autochtone du nord de l’Alberta, Shelley est membre de la Première Nation des Cris de Bigstone. Un soir, quand elle était petite, sa mère avait insisté pour qu’elle mange le navet qui restait dans son assiette. Shelley s’était montrée réticente, comme l’auraient été plusieurs enfants de son âge. Son père était intervenu pour permettre à Shelley de ne pas manger son navet si elle n’en avait pas envie.

Shelley CardinalCe commentaire a été l’élément déclencheur de nombreuses conversations familiales sur les abus subis par le père de Shelley au pensionnat. Elle a appris que son père avait notamment été forcé de manger certains aliments, y compris des navets. Plus elle en apprenait sur la terrible souffrance de son père, plus elle s’intéressait aux abus qui lui avaient été infligés. C’est d’ailleurs là qu’elle a su qu’elle voulait faire carrière en accompagnant les personnes ayant vécu des traumatismes semblables.

Au Canada, les pensionnats ont existé de 1883 à 1996. Pendant cette période, plus de 150 000 enfants ont été arrachés à leur famille. Bon nombre d’entre eux ont été victimes de traitements horribles. On estime qu’environ 6 000 pensionnaires sont décédés pendant leur séjour. Ces années constituent une période très sombre de l’histoire du Canada, et les communautés autochtones en portent toujours les séquelles aujourd’hui.

Les communautés autochtones du pays entier ont subi des traumatismes chroniques et répétés depuis le contact initial, à savoir les déplacements hors des terres ancestrales, les maladies dévastatrices, la Loi sur les Indiens, l’interdiction des pratiques culturelles, les pensionnats, la rafle des années 1960 ainsi que des préjudices systématiques sur plusieurs générations. En créant la Commission de vérité et réconciliation du Canada, le gouvernement fédéral a entrepris une longue démarche cherchant à réparer les torts commis envers les peuples autochtones, qui doivent encore affronter d’importants obstacles et préjudices. Des injustices dont les répercussions perdurent depuis des générations et qui se perpétuent dans des familles comme celle de Shelley. Le suicide, la dépendance, les problèmes de santé et la violence demeurent des fléaux qui se manifestent de manière disproportionnée dans les communautés autochtones.

Toutefois, c’est dans la noirceur qui accompagne les souffrances les plus profondes que naît parfois l’espoir.

Les traumatismes relatés par les membres de sa communauté ont inspiré Shelley à devenir un agent de changement pour le bien des peuples autochtones du Canada. Elle a donc fait des études et obtenu un baccalauréat en psychologie et une maîtrise en leadership avant de se joindre à la Croix-Rouge canadienne, où elle élabore des programmes de prévention de la violence destinés aux communautés autochtones.

Aujourd’hui, Shelley Cardinal est gestionnaire principale nationale, Recherche et mobilisation des communautés autochtones. Ayant travaillé en étroite collaboration avec des communautés autochtones depuis plus de 30 ans, Shelley continue de jouer un rôle essentiel dans la création d’environnements sécuritaires. Grâce à sa connaissance intime des préoccupations auxquelles sont actuellement confrontés les peuples autochtones, elle aide les communautés à adopter des stratégies de prévention et de protection afin de mitiger l’impact de la colonisation, à savoir la souffrance et la violence. Cette démarche permet aux communautés de renforcer leurs capacités et de guérir progressivement de leurs blessures.

Avec l’appui de Debra Pepler, docteure, Shelley mène une recherche visant à établir les mesures que pourrait prendre la Croix-Rouge canadienne pour renforcer son engagement auprès des communautés autochtones au Canada. Shelley Cardinal et Debra Pepler ont démontré que les solutions fondées sur les pratiques culturelles amènent les collectivités à reconstruire des environnements sécuritaires. L’objectif est de réduire la souffrance et de favoriser l’autonomisation de façon à ce que les membres des communautés puissent se mobiliser et entreprendre leur guérison en se réappropriant leur patrimoine culturel.

La Croix-Rouge canadienne a d’ailleurs mis en place des solutions misant sur l’autonomisation, notamment par son partenariat avec la tribu des Blood. C’est ainsi que la Croix-Rouge a appuyé le renforcement des capacités locales, entre autres par la formation de membres de la tribu en matière de gestion des urgences. Plus tard, lorsque leur région a été touchée par un feu de forêt, ce sont les membres de la communauté, formés par des intervenants de la Croix-Rouge, y compris Shelley, qui ont géré l’intervention du début à la fin.

La Croix-Rouge canadienne collabore depuis longtemps avec les populations autochtones du Canada. À la lumière du contexte historique et de la mission de la Croix-Rouge, soit celle de servir les personnes les plus vulnérables, Shelley Cardinal dirige les efforts visant à établir des partenariats positifs avec les communautés autochtones. C’est en partie grâce aux femmes leaders comme Shelley Cardinal que les communautés autochtones parviennent, petit à petit, à guérir de 500 années de souffrance entraînée par la colonisation.
 

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