Sauver le petit Nazradeen

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Gereida, Sud Darfour, le 19 avril 2007 – Penny Connley, une infirmière de la      Croix-Rouge, supervise un centre d’alimentation thérapeutique mis en place par la Croix-Rouge britannique et la Croix-Rouge australienne. Le centre a ouvert ses portes à Gereida, une ville isolée du Sud Darfour, et reçoit les enfants souffrant de malnutrition sévère, qui vivent dans un camp abritant 100 000 personnes déplacées par les combats. Chaque semaine, la Croix-Rouge prodigue des soins à 700 enfants malnutris de moins de cinq ans.

Penny Connley nous fait part de l’histoire de l’un de ses jeunes patients. 

« Je veux partager avec vous ma rencontre avec un jeune garçon de 13 ans appelé Nazradeen.

« Je l’ai rencontré il y a huit semaines, lorsque ses frères l’ont amené au centre d’alimentation thérapeutique. La première fois que je l’ai vu, il était allongé par terre. Ses jambes étaient attachées au niveau des chevilles, des genoux et des cuisses. La peau de la plante de ses pieds pendait comme une paire de gants, et il avait d’importantes plaies sur les jambes.

« Les lèvres de Nazradeen étaient toutes gercées et saignaient – un vrai festin pour les mouches. Il était tellement faible qu’il ne pouvait même pas lever les bras pour les chasser. Des larmes coulaient sur son visage. On aurait dit qu’il se moquait de mourir, mais après avoir entendu la manière épouvantable dont il avait perdu sa mère, sa réaction était tout à fait compréhensible.

« Puis, nous l’avons pesé. Son poids était d’à peine 25 kilos pour environ 1m65. Même si je doutais moi-même sur les capacités de survie de Nazradeen et sur ce que je pouvais faire pour lui, je l’ai admis au programme d’alimentation et de soins de jour.

« Cela va faire plus d’un mois maintenant qu’il a été admis. Le travail a été laborieux, mais tellement gratifiant pour nous tous.

« Nous avons commencé par détacher les jambes de Nazradeen. Il n’avait plus aucun muscle. Il pouvait seulement bouger le petit orteil. Ses jambes étaient molles comme de la gelée.

« Petit à petit, nous avons commencé par lui faire faire des exercices. Cela a été possible grâce à une motivation grandissante et aux efforts considérables de ses frères qui payaient les services d’un âne et d’une charrette pour pouvoir l’amener tous les jours de l’autre côté du camp jusqu’au centre d’alimentation.

« Nazradeen a regardé le film Shrek sur mon ordinateur portable et je lui ai donné un stylo et du papier. Quand sa motivation commençait à flancher, je lui ai promis de lui rapporter un ballon de football, de mon prochain voyage à Londres. Je lui ai dit que la Croix-Rouge du monde entier avait entendu parler de lui et qu’elle demandait quotidiennement de ses nouvelles. Le lendemain, il est revenu au centre avec un dessin d’un délégué conduisant un landcruiser et il m’a demandé de le remettre de sa part à la Croix-Rouge.

« Il a recommencé à manger petit à petit. Un jour, il a souri puis ri (en voyant un kangourou gonflable!). Il a fait des exercices et a appris à se tenir debout en s’accrochant à une barre fixée au plafond. Parfois, il lui arrivait de renoncer, de transpirer, de pleurer et je sentais son pouls s’accélérer à cause des efforts qu’il fournissait. Chaque jour, je lui disais que tout le monde pensait à lui. Cette pensée lui redonnait toujours le sourire.

« Nous avons trouvé des béquilles pour Nazradeen. Tout le personnel sautillait dans le centre pour lui montrer comment s’en servir. Hier, j’ai entendu mes employés crier, puis applaudir. Toutes les mères qui étaient au centre avec leurs enfants ont commencé à siffler comment elles le font lors des festivités. Nazradeen, ce garçon qui, un mois plus tôt, ne pouvait pas se nourrir, se gratter, aller tout seul aux toilettes ou bouger un membre, arrivait désormais à se déplacer avec des béquilles! Il avait un sourire jusqu’aux oreilles. Je pleurais de joie et mes cheveux se dressaient sur ma tête. Il ne s’était écoulé qu’un seul mois depuis notre première rencontre et Nazradeen était devenu une autre personne.

« Aujourd’hui, j’ai dansé avec Nazradeen qui se tenait sur ses béquilles. Il m’a demandé de vous remercier tous. »